12-01-2024

L’ordonnance Bruxelles numérique est votée. Garantit-elle les guichets ?

De retour

L’ordonnance Bruxelles numérique a été définitivement approuvée par le parlement bruxellois ce vendredi 12 janvier 2024 ; par 45 « oui » (PS, Écolo, DéFI, Groen, OpenVLD, Vooruit/one.brussels), 16 « non » (PTB, Engagés, CD&V) et 21 abstentions (MR, N-VA, Agora).
Garantit-elle les guichets et les services non-numérique?

Avancées

La mobilisation citoyenne a mis en lumière l’importance du contact humain entre les services d’intérêt général et leurs usagers. Notre mouvement a également politisé la question du numérique. La place du numérique dans la société et ses impacts sociaux, démocratiques et environnementaux font désormais l’objet d’un débat public dans la capitale. Chacune de nos actions a, en outre, permis de faire évoluer favorablement le projet d’ordonnance. Cela a encore été le cas grâce à notre dernière manifestation, au moment où les députés débattaient du texte en séance plénière.

Question

La législation adoptée par le parlement garantit-elle, comme nous l’exigeons, les guichets physiques ?

Principe

L’ordonnance, par la voix du ministre de la transition numérique, consacre le principe de « l’humain d’abord », via des guichets physiques et des services téléphoniques dans les administrations locales et régionales.

Texte

Mais que dit exactement l’article 13, sur lequel nous nous sommes battus pied à pied ?

§ 1er et § 2. Les autorités publiques garantissent l’inclusivité et l’accessibilité à tout usager, a minima par les mesures suivantes (…) la mise en place ou le maintien d’une alternative à toute procédure administrative ou à toute communication en ligne.

A minima, les autorités publiques doivent prévoir pour leurs usagers un accueil physique, un service téléphonique et un contact par voie postale. Des mesures alternatives peuvent être mises en place pour autant qu’elles garantissent à l’usager concerné un niveau de service au minimum équivalent aux mesures précitées.

Les autorités publiques garantissent aux usagers un accès adéquat aux services qu’elles leur destinent et des horaires d’ouverture adaptés aux missions et au public.

§ 8. Les autorités publiques ne sont pas tenues de satisfaire aux exigences visées aux paragraphes 1er, alinéa 1er, et 2, alinéa 1er, lorsque ces exigences ont pour effet d’imposer une charge disproportionnée aux autorités publiques.

Interprétation

En séance plénière du parlement, le ministre a été interpellé sur cet article 13. Voici l’interprétation la plus optimiste que l’on peut donner de ses réponses et des propos d’élus de la majorité.

Le ministre précise que les autorités devront maintenir un accueil physique (humain), un service téléphonique (humain) et un service postal. Trois précisions à cet égard.

  1. Il sera possible aux administrations de réduire le nombre de guichets mais pas de supprimer l’accès physique. Il sera obligatoire de conserver au moins un accès guichet ; des guichets adéquats, en quantité suffisante pour satisfaire les besoins de la population.
  2. Il sera possible aux administrations de sous-traiter les guichets, mais avec un niveau de service équivalent.
  3. Les groupes PS et Écolo (les deux poids lourds de la majorité régionale) affirment que, comme le paragraphe 8 ne concerne que l’alinéa 1er des paragraphes 1 et 2, les administrations ne pourront pas se prévaloir d’une charge disproportionnée pour s’attaquer à leurs guichets physiques.

Problèmes

Sans s’attarder sur les nombreuses limites du texte en matière d’accès aux services publics et de contrôle sur le numérique, il faut reconnaître qu’il aurait été préférable de garantir clairement et explicitement les guichets dans le texte, plutôt que de devoir s’en remettre à des interprétations.

Qui plus est, ces interprétations orales posent trois problèmes. Les deux premiers démontrent que c’est une version bien pâle, au rabais, du principe de « l’humain par défaut » qui est offerte aux citoyens. Le troisième est encore plus sérieux, puisqu’il est susceptible de remettre en cause les guichets physiques.

  1. Alors que la population a besoin de guichets supplémentaires, on permet d’en réduire le nombre, sur base de critères flous.
  2. On stimule la sous-traitance de l’accès aux services publics.
  3. Le ministre n’a jamais cautionné l’interprétation donnée par le PS et Écolo au paragraphe 8 de l’article 13. Faut-il en conclure que « qui ne dit mot consent » ? Il s’agit là d’une garantie tout à fait insuffisante.

Suites

Dans ces circonstances, nous demandons deux choses au ministre Clerfayt. Il doit :

  • assurer que la sous-traitance des guichets et des téléphones n’ira pas vers des entreprises privées,
  • surtout, avaliser publiquement l’interprétation du PS et d’Écolo, en affirmant sans ambiguïté que la charge disproportionnée du paragraphe 8 ne concerne ni l’accueil physique, ni les services téléphoniques, ni les courriers postaux.

C’est uniquement si cette dernière requête est satisfaite que nous pourrons dire que l’ordonnance, à défaut de valoriser les guichets, au moins les sauvegarde. Dans le cas contraire, les associations qui ont mené campagne contre l’ordonnance devront envisager la possibilité d’introduire un recours contre ce texte discriminatoire devant la Cour constitutionnelle.

ce texte est une reprise de l'analyse de Lire et Ecrire Bruxelles

vers le texte de Lire et Ecrire

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